POESIE - ILLUSION ET PARTAGE
César : un peu de poésie dans ce monde de brutes - juste pour en sourire !
Le temps est venu, le temps des meurtrissures,
Les spadassins d'Ephesse se sont trompés de cible.
Au parvis de Pisan, cette entrée n'est plus sûre.
Aussi, le roi Ubu, depuis peu irascible,
Souhaite de ses sujets freiner la liberté.
Il a fait installer, à l'entrée du palais,
Des chicanes sonnantes qui flattent sa fierté
De filtrer ces penseurs qu'il rêve d'empaler.
D'un Moloch des ténèbres, qu'il a mandé parbleu !
Il interdit l'entrée à ceux qu'il veut détruire.
Car ceux là pensent rouge alors qu'il pense bleu.
Ne comprennent-ils pas ces empêcheurs de nuire,
Que le bleu sied mieux aux métaux et dorures ?
Ils sont nombreux pourtant à tendre leurs mains vides,
Pour revêtir enfin cet habit qu'ils espèrent.
Ils sont là à tourner avec leurs yeux avides.
Car bientôt, sur leur peau, les habits de leurs pères
Offriront l'illusion qu'ils ont changé de tête,
Que soudain, par effet d'une lueur magique,
Sagesse leur viendra. Alors ceux-là s'entêtent.
Et bien, moi, je les plains, car cela est tragique.
Au milieu des ténèbres, l'Hydre de fortitude
De sa tour de Pisan a déployé ses gueules.
Dans toutes nos Provinces, et dans ses temples vides
D'où Amour s'est enfui, ses sbires lâches et veules
Déploient ses ordonnances de leurs mains impavides.
Écoute la rumeur, écoute le tumulte,
Car le vide du temple remplace la ferveur
Qui l'habitait jadis, avant que soit l'insulte.
Des fous, du roi Ubu, reçoivent les faveurs.
Avec quelques chiffons, ils habillent des niais
Qui se croient devenus, tout soudain, roitelets.
Ils sont pleins de dorures, on ne peut le nier !
Mais leur esprit ressemble aux ânes attelés.
Car l'âme des hommes ailleurs s'est éloignée.
Elle a fait dans des murs, où rien n'est qui se vende,
Refleurir l'espérance, grains semés à poignées
Qui lors feront jaillir, la nouvelle provende.
Le cœur des hommes forgé aux terribles épreuves,
A cru comme le blé sous le soleil d'été.
Et si ne m'en croyez, s'il fallait une preuve,
Venez sur nos colonnes de vraie fraternité !
Tous se rassemblent au moment du partage,
Ici nul ne voudrait en tirer avantage.
Pierre d’Angles